A propos de la Cérivastatine

 

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A propos de la Cérivastatine



Début août 2001, la nouvelle tombe brutalement, la Cérivastatine (nom commercial: Staltor et Cholstat en France) est retiré du marché.
La raison invoquée est la mort aux Etats-Unis de 52 malades traités par l'association Cérivastatine- gemfibrozil (Lipur) à dose double ou triple de celle de la France.

Ces médicaments désignés sous le nom de statines sont utilisés dans le traitement de l'hypercholestérolémie et représentent un progrès thérapeutique majeur. Cependant, comme tout médicament « actif », ils ont des effets indésirables connus, au premier rang desquelles une toxicité musculaire qui peut aller jusqu'à la rhabdomyolyse (destruction des fibres musculaires) avec insuffisance rénale secondaire. Cet effet secondaire se traduit au niveau sanguin par l'élévation des transaminases, modéré et réversible à l'arrêt du traitement, et par l'élévation de la créatine phosphokinase (CPK) d'origine musculaire (environ 1% des patients traités).
Les maladies de la thyroïde, l'insuffisance rénale chronique, la pratique intensive d'un sport et surtout les interactions médicamenteuses impliquant le cytochrome P4503A4 ou CYP 3A4 (enzyme synthétisé par le foie) constituent des circonstances favorisant la survenue des effets indésirables musculaires.

Il existe de nombreux médicaments inhibiteurs du CYP 3A4 comme le diltiazem, le vérapamil, l'érythromycine, la clarithromycine, les antirétroviraux, le kétoconazole, la ciclosporine et le jus de pamplemousse.

L'inhibition du CYP 3A4 ralentit l'élimination des statines et élève leur concentration plasmatique, favorisant ainsi la survenue d'effets indésirables musculaires.
Parmi les statines actuellement sur le marché, seules la fluvastatine et la pravastatine n'interférent que très peu avec le CYP 3A4
La prescription de statines non métabolisées par le CYP 3A4 semble préférable chez les patients prenant plusieurs médicaments (d'après le centre de pharmacovigilance de Toulouse).

A noter aussi la possibilité de tendinopathies (tendinites, surtout du tendon d'Achille) avec toutes les statines comme avec d'autres médicaments (fluoroquinolones, rétinšides, fibrates et corticoïdes).

Bref, les effets secondaires des statines sont connus depuis longtemps, les douleurs musculaires ne justifient pas forcément l'arrêt du traitement si elles sont peu intenses, le gemfibrozil incriminé dans les 52 décès n'est pas retiré du marché (il est d'ailleurs peu prescrit en France), les autres statines vont simplement faire l'objet d'une réévaluation (qui prendra du temps). Alors pourquoi ne retirer du marché que la seule cérivastatine ?
Pourquoi n'intenter des procès qu'à la seule cérivastatine ?

Peu importe à vrai dire, car il existe d'autres statines, mais le vrai problème est que, si c'est la seule raison, on peut se demander pourquoi ne pas retirer du marché une bonne partie de la pharmacopée.
En effet les anti-inflammatoires tuent plus aux états unis que le SIDA !!
Les antibiotiques, à commencer par la simple pénicilline, ont tué nombre de malades mais en ont sauvé beaucoup plus.
L'aspirine, à lui seul, est responsable d'un nombre effarant d'accidents et s'il était découvert maintenant, il n'aurait aucune chance d'avoir d'autorisation de mise sur le marché.
Ne parlons même pas des anticoagulants ou des chimiothérapies.
On pourrait multiplier les exemples à l'envie.

De cette affaire découle, outre certains procès plus ou moins folkloriques, des propositions amusantes comme de prévenir chaque malade des effets secondaires possibles des médicaments prescrits. Non seulement cela risque d'augmenter de façon exponentielle le temps de consultation mais surtout de décourager toute prise de médicaments... en effet toute prescription s'accompagne d'une réflexion sur le rapport bénéfice/risque. Et si l'on explique le risque, il faudra expliquer le bénéfice escompté en fonction de la maladie.
A ce compte là, il y aura vite pénurie de médecins.

Evolution d'une société surmédiatisée qui se veut responsable mais exige un risque zéro totalement utopique et rêve d'une vie éternelle qui l'est tout autant ?
Evolution d'une médecine toute puissante où toute prescription n'est pas forcément justifiée ?
Evolution d'une industrie pharmaceutique détenue maintenant par des multinationales écartelées entre le profit maximum et le risque de procès coûteux ?
Evolution de patients qui exigent leur dû mais oublient leurs devoirs... Au fait, tous les malades sous statines suivent-ils leur régime ?

 



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